( Articole publicate de ziarişti francofoni acreditaţi în China. Articol apărut în 13 decembrie 2020.)
L’année 2020 a débuté avec une épidémie, elle se terminera par un vaccin.
Dans cette course à l’inoculation, la Chine avait l’avantage d’être la première
sur la ligne de départ, mais a été ralentie par le manque de cas de Covid-19
sur son territoire, la forçant à délocaliser ses essais cliniques (Argentine,
Égypte, Jordanie, Maroc, Pérou, Russie, Arabie Saoudite, Brésil, Chili, Turquie…).
À
l’inverse de certains vaccins occidentaux de technologie innovante (ARN), les
deux candidats de chez Sinopharm et celui
de chez Sinovac utilisent un « virus inactivé
», le procédé historique pour concevoir un vaccin, mieux connu et donc réputé
plus sûr. Cependant, Gao Fu, le directeur du CDC national, mettait en garde en
septembre contre un phénomène de « facilitation de l’infection par des anticorps »
(ADE), durant lequel les anticorps trahissent leur mission et aident le virus à
se répliquer. Le scientifique ajoutait : « les vaccins inactivés sont plus prônes à
ce genre de réaction que ceux basés sur la séquence génétique ».
Celui
de CanSino lui, a recours à la même méthode que celui d’Oxford/AstraZeneca,
dit à « vecteur viral » – une technique qui a contribué à mettre un
terme à l’épidémie d’Ebola.
Avantage logistique de
taille, les quatre vaccins expérimentaux chinois peuvent être transportés entre
4°C et 8°C, ce qui n’est pas le cas du vaccin germano-américain de Pfizer/BioNTech et
de l’américain Moderna, nécessitant des
températures extrêmes (de -20°C à -70°C). Ce faisant, les candidats chinois
s’alignent sur la stratégie de leur gouvernement, qui ambitionne d’exporter des
doses par millions, en Asie (pays du
Mékong notamment), en Afrique et en Amérique
du Sud. Mi-novembre, près de 500 millions de doses de vaccins
chinois étaient déjà précommandées.
Lancée
dans une course contre la montre, la Chine aurait donc donné son approbation
pour une utilisation d’urgence dès fin juillet,
avant même de recevoir les résultats de la dernière phase des essais cliniques
à l’étranger. Conscientes du risque de polémique, les autorités ont mis plus
d’un mois avant de reconnaître que la vaccination d’urgence avait déjà
commencé. Pour justifier cet empressement, la Chine a mis en avant le fait que
les personnels à risques (médecins, infirmières, militaires, diplomates,
douaniers…) ne pouvaient pas se permettre d’attendre. Le virus est pourtant
sous contrôle dans le pays depuis l’été.
Depuis
lors, quiconque en Chine, en partance pour l’étranger ou non, peut facilement
recevoir une dose. Fin novembre, Sinopharm annonçait
avoir vacciné plus d’1 million de personnes.
Officiellement, aucun effet secondaire grave n’a été observé. Pour gagner du
temps, le groupe pharmaceutique aurait sollicité dans la foulée une autorisation
de mise sur le marché. Un feu vert des autorités en ferait le premier vaccin accessible au public en
dehors de Russie.
En
vaccinant à tour de bras sa propre population, Pékin veut démontrer que ses
vaccins sont sûrs. Cela dit, le manque de communication sur
les résultats de ses essais cliniques à l’étranger, comme sur ceux de son
programme d’urgence, pourrait s’avérer contreproductif.
L’exemple le plus récent est celui des Émirats arabes unis :
mis à part les 86% d’efficacité avancés pour l’un des vaccins de Sinopharm,
très peu d’informations ont filtré… La firme s’estime toutefois capable de
produire 100 millions de doses d’ici la fin de l’année, et d’augmenter sa
capacité à 1 milliard en 2021.
De
son côté, Sinovac devrait être en mesure de
doubler sa capacité annuelle de production à 600 millions de doses d’ici la fin
de l’année grâce à un second site de fabrication. Malgré le manque de détails
sur les résultats des essais (attendus courant janvier), la firme a déjà envoyé
1,2 million de doses en Indonésie,
suffisamment pour vacciner 600 000 personnes. D’après les données
préliminaires publiées au Lancet, le
vaccin de Sinovac produirait un niveau d’anticorps moins important qu’une
personne ayant guéri de la Covid-19.
À
travers ces vaccins, c’est la réputation de
l’industrie pharmaceutique chinoise qui est en jeu. Tous les Chinois se
souviennent des récents scandals de vaccins périmés et de corruption… Néanmoins, l’impatience du public et un certain sentiment nationaliste
semblent prévaloir sur ces craintes. Reste à voir si les fabricants sauront
surmonter leurs vieux démons pour produire rapidement et en toute sécurité des
millions de doses, non seulement pour la Chine, mais aussi pour le monde
entier, le moindre incident pouvant compromettre cette « diplomatie
du vaccin »… Si la stratégie réussit, ce sera une façon pour
la Chine de parer aux critiques sur sa gestion de l’épidémie, de redorer son
image à l’international mais aussi d’accroître son influence.